Adresse :
Chapelle de Boendael Ixelles
Coordonnées GPS :
50.8073 , 4.3916
Inventaire scientifique :
Traces de campagne - Boondael

Carte d'identité

Catégorie :
Arbre remarquable
Nom en latin :
Tilia platyphyllos
Nom en français :
Tilleul à larges feuilles
Nom en néerlandais :
Zomerlinde
Nom en anglais :
Large-leaved lime
Famille :
Tiliaceae
Hauteur :
17 m
Hauteur visée :
Cette espèce peut atteindre jusqu’à 40 m
Diamètre de la couronne :
15 m
Circonférence du tronc :
556 cm
Circonférence espérée :
700 cm
Longévité espérée :
Peut vivre entre 1000 et 2000 ans
Origine / Indigène :
Europe
Sol préféré :
Tous
Climat préféré :
Tempéré frais

Utilité et services de l'arbre

Embellit le paysage :
+++ élément du paysage depuis plus de 400 ans
Enrichit la biodiversité :
++ champignons et insectes dégradent le cœur du tronc
Fournit de l'oxygène :
+++ grande surface de feuilles, bonne vigueur de croissance
Purifie l'air :
+++ idem, en plein cœur de la ville !
Filtre l'eau :
++ transpiration moyenne
Évite les inondations :
+ réseau d’égouttage au pied de l’arbre
Stocke le carbone :
+ extrémités en croissance mais cœur en dégradation
Adoucit le climat :
+++ ombrage de la place
Limite l'érosion du sol :
ø
Fait du bien, guérit :
+++ fleurs, feuilles, aubier, écorce, bois
Collection de l'Etat fédéral belge en prêt permanent au Jardin botanique de Meise. <https://www.plantentuinmeise.be/fr/home/> Hempel, Die Bäume und Sträucher dese Waldes, pl. 42, 1889

Arbres liés - jumelage

Traits et caractères de l'individu

De loin on dirait que ce tilleul est un gamin. Pourtant c’est le plus vieil individu de cette espèce à Bruxelles : un vétéran au tronc creux. Comme le Phoenix qui renaît de ses cendres, les tilleuls meurent et renaissent plusieurs fois dans leur vie. Les vieilles cartes postales montrent que cet arbre s’est replié sur lui-même durant tout le 20° siècle. Il n’a toutefois pas été abattu. Et aujourd’hui, il a recréé une nouvelle couronne vigoureuse.

L’Arbre Phoenix

Comme son nom l’indique le vieux tilleul est un vétéran bruxellois. Son âge a déjà fait couler beaucoup d’encre. Il est si vieux qu’il est peut-être le dernier survivant des prairies qui bordaient le hameau de Boondael. A-t-il été planté au 15° siècle par une famille de fermiers installés là ? A-t-il été témoin des fêtes que Charles Quint donnait en l’honneur des vainqueurs de courses de chevaux au Serment des Arquebusiers ? Certains pensent qu’il a été planté en 1463, en même temps que la chapelle Saint-Hadrien. D’autres qu’il ne serait sorti de terre qu’au 17° siècle, lorsque la chapelle a été reconstruite. Aujourd’hui on lui donne 400 ans. Mais il est possible qu’il soit bien plus vieux que ça.

Remonter dans le temps

Pour qui sait lire dans l’architecture de ce monument vivant, il y a des signes qui ne trompent pas. D’abord son tronc est très gros : il faut au moins trois personnes pour embrasser ses cinq mètres soixante de circonférence. Ensuite sa couronne magnifique forme un grand dôme autour de la chapelle. Ces indices permettent d’affirmer que l’arbre a plusieurs siècles. Mais ils ne suffisent pas pour dater précisément sa date de naissance.

Pour connaître son âge exact, il faudrait pouvoir compter le nombre de cernes qui composent son tronc (une par année). Mais le vieux tilleul d’Ixelles est complètement creux. Dès lors, c’est en plongeant dans les archives de la Région et de la ville que l’on peut essayer de retracer son histoire.

Les documents historiques ne permettent pas de remonter jusqu’en 1463. Mais en 1717, le tilleul de Boondael a retenu l’attention d’un géomètre. Il l’a dessiné et commenté. Et sur son illustration l’arbre a déjà une silhouette de centenaire. Ainsi, cet individu a sûrement au moins 400 ans, ce qui n’est pas beaucoup pour un tilleul de son espèce. En effet, les Tilia platyphyllos, ou tilleuls à grandes feuilles, peuvent vivre facilement jusqu’à 800 à 1000 ans si leur environnement leur est favorable.

Une série de cartes postales permettent de montrer comment cet arbre s’est complètement reconstruit au 20e siècle. En 1900 il était tout rabougri. Il a mystérieusement abandonné beaucoup de branches tout au long du 19e : son tronc est devenu tout creux, sa couronne a rétréci. L’individu s’est replié sur lui-même. Ensuite, au 20e, il est reparti. Son houppier s’est redéployé à la conquête de l’espace. Cette incroyable capacité à se regénérer est inscrite dans les gènes des tilleuls.

Renaître de ses cendres

Cette espèce au bois tendre se dégrade facilement. Mais elle a des stratégies qui lui permettent de traverser les siècles. En été, le tilleul est capable de perdre ses feuilles par grande sécheresse et d’en reproduire dès qu’il a nouveau de l’eau. Quand on le coupe, il rejette de souche. Quand son environnement lui est hostile ou défavorable, il se débarrasse de ses branches, perd de gros morceaux de sa couronne. Une façon d’économiser son énergie. Son tronc se creuse, parfois s’ouvre ou se fend sur toute sa hauteur. Il s’effondre sur lui-même. Il peut aller jusqu’à ne garder que sa souche. Il attend des jours meilleurs. Car, de là, il est capable de repartir : comme le Phoenix qui renaît de ses cendres. Il forme des bouquets de rejets à partir de sa vieille souche. C’est ainsi que l’on rencontre trouve parfois des colonies de tilleuls qui poussent en arc de cercle : ils sont en fait un seul et même individu, un très vieil arbre, jadis géant.

Une signature arborée

La longévité légendaire des tilleuls en a fait un arbre de choix pour marquer l’espace et le temps. Depuis le Moyen Age, on les plante près des lieux de culte (chapelles, sanctuaires, cimetières, etc), au centre des villages, ou encore en point de mire dans les paysages. On comptait sur leur capacité à traverser les siècles pour laisser des traces dans l’Histoire et la Géographie. Un peu comme une signature.

Dans le cas du vieux tilleul d’Ixelles, le pari a réussi. Il a traversé plusieurs siècles. Il a donné son nom au square où il pousse. Depuis 400 ans, son histoire est liée à la vie du quartier Boondael. Plusieurs générations d’habitants l’ont visiblement porté dans leur coeur.

L’arbre du coeur

Les feuilles du tilleul sont cordées (en forme de cœur) et finement dentées. Celles du Tillia platyphyllos sont particulièrement grandes. Elles sont un symbole d’amour et de fidélité. Comme de nombreux autres tilleuls, cet arbre a sans doute été le confident des amoureux. Sa large couronne a sûrement accompagné la vie du hameau : ses baptêmes, mariages, enterrements, et assemblées. Sa floraison, parfumé les soirées d’été de tout le quartier. Ses tisanes, adouci les petits maux de saison.

Ce grand être creux a-t-il été un refuge, un guérisseur, un lieu de cultes païens ou encore un sanctuaire chrétien ? Bien que vide et sur le point de s’ouvrir, ce tilleul n’a pas connu la cognée ou la tronçonneuse. La population et la commune d’Ixelles ont particulièrement choyé cet arbre.

Il a reçu une série de coups de pouces pendant le 20e siècle. Une pompe à eau a été installée à son pied. Les habitants se réunissaient sous sa couronne pour s’approvisionner en eau. Et puis en 1936, le vieil arbre a été classé. Ce monument vivant a volé la vedette à la chapelle voisine, qui, elle, n’a pas reçu les mêmes honneurs.

Les autorités n’ont pas eu peur que l’arbre s’écroule. Elles lui ont laissé une chance. Plutôt que l’abattre, elles l’ont accompagné dans son histoire. Une colonne de béton a été coulée dans sa cavité pour assurer sa stabilité. Et une écorce a été gravée en trompe l’œil dans le béton pour que l’intervention soit la plus discrète possible. Côté chapelle, ces rocailles ont été peu à peu englouties par l’arbre, signe de reprise. L’arbre a aussi créé des disques de bois par endroits : il a recouvert les boulons d’une tige filetée qui avait été placée à l’intérieur du tronc pour éviter qu’il ne se fende.

Aujourd’hui, le vétéran se comporte comme un jeune en pleine forme. Il montre ce dont un arbre est capable quand on lui fait confiance … Le plus beau cadeau qu’on pourrait lui faire serait de remplir sa grande cavité de matière organique. Le vieux tilleul pourrait ainsi développer de nouvelles racines à l’intérieur de son tronc. Elles pourraient rejoindre le sol, grossir. En créant ces câbles naturels, le tilleul renforcerait sa structure pour traverser le millénaire.

(Textes et photos par Priscille Cazin https://www.sylvolutions.eu)

Ce portrait est enrichi d’une illustration issue de la Collection de l'Etat fédéral belge en prêt permanent au Jardin botanique de Meise. https://www.plantentuinmeise.be/fr/home/

Photos: Priscille Cazin - Sylvolutions /32shoot asbl
© PC-Z
© PC-Z
-
© PC-Z
© Photo : Bruno Campanella – Patrimoine naturel, Région Bruxelles Capitale
Série Photo: © Priscille Cazin - Sylvolutions / 32shoot asbl
© PC-Z
Photos: Priscille Cazin - Sylvolutions /32shoot asbl
© PC-Z
© PC-Z
© PC-Z
© PC-Z
© Bruciel 1953
© Bruciel 1971
© Bruciel 1996
© Bruciel 2015
© coll. Belfius Bank - Académie royale de Belgique © ARB - urban.brussels
© coll. Belfius Bank - Académie royale de Belgique © ARB - urban.brussels
© coll. Belfius Bank - Académie royale de Belgique © ARB - urban.brussels
© PCDN d’Anhée - Jumelage Tilleul de Bioul
© PCDN d’Anhée - Jumelage Tilleul de Bioul
© PCDN d’Anhée - Jumelage Tilleul de Bioul